Un nouveau tour aux archives départementales m'a permis d'en savoir plus : on y trouve toutes les études pour les trois lignes comme les comptes-rendus des réunions du syndicat des TC de l'époque, pour les années 1955-1965 ...
La chose la plus étonnante que j'ai pu découvrir, c'est que dans les deux cas, ligne B comme C, la déclaration d'utilité publique est intervenue bien
après la mise en service commercial de la ligne ... Retour en arrière.
Dès 1939, on commence à penser sérieusement au tramway : Vetra vient de sortir ses derniers modèles, et c'est autrement plus moderne que les motrices Thomson qui arrivent déjà en fin de course. En 1941 un rapport assez sérieux est remis, préconisant l'équipement de 38,5 kms de ligne, pour 43,4 kms exploités commercialement. Le trolley de 40-45 places coûte alors 300kF, celui de 60 places 340kF. Le km de bifilaire, 200kF, de quadrifilaire, 300kF. Plutôt que d'électrifier tout le réseau, on choisi de laisser des autobus entre le Pont de la Motte et Luynes-Fondettes, et entre Saint-Avertin et Azay. Le réseau urbain reprend lui les tronçons du tramway délaissés dans les années 30. On aurait donc pu avoir, sauf erreur(s) de ma part, ce réseau-ci :
Une estimation avait été faite pour le matériel nécessaire : 10 trolleys de 40/45 places, 20 de 60 et 8 autobus de 45-50 places (un avant-projet en prévoyait respectivement 11, 26 et 2, mais il sembla préférable d'économiser des sous en ajoutant des bus les jours de forte demande). Le coût global de ce plan était estimé en 1941 à 19,4 MF (soit, à pouvoir d'achat constant, 6 millions d'euros ... eh oui.). Les bus n'avaient au demeurant pas à être achetés, et de petites économies étaient réalisables sur l'infra en réutilisant celle du tramway. Enfin bref, la guerre fut ce qu'elle fut, mais ce plan servit de base aux travaux d'après-guerre.
En 1945 donc, la situation est plus que critique : outre les pénuries de tout, le parc de tramway ne compte que 12 motrices en état de marche, et une infrastructure dans un triste état. Un trolleybus est donc présenté le 14 octobre 1947 à la population, place Jean Jaurès. Et on grogne déjà un peu à cause des fils : je cite cette phrase délicieuse trouvée dans un document d'époque : "
Les urbanistes cherchent à faire de Tours une ville essentiellement touristique, toute l'industrie étant repoussée à Saint-Pierre-des-Corps, commune limitrophe. Il ne leur parait donc pas d'un beau cachet pour la ville de la sillonner de fils aériens." Pour la petite histoire, la commission des Sites, où siégeaient Labadie, Patout, Royer, etc, ne posera qu'assez peu de problèmes, principalement pour des questions de hauteurs de pylônes sur le pont Wilson.
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La ligne B-B1 fut la première envisagée, étant à l'époque la plus chargée. Longue de 6,8 kilomètres, elle allait de la place de Stalingrad (quartier Beaujardin) aux Abattoirs (quartier St-François). La branche desservie par la B1, longue de 800m, reliait le carrefour Ste Anne à l'église de La Riche. Les travaux, menés par Trindel-Forclum, débutèrent le 9 mai 1949, et la mise en service fut effective le 05 octobre (après inauguration officielle la vaille). Au mois de décembre (sic !), le Ministère approuve les conventions passées pour la création des lignes. La déclaration d'utilité publique est signée le 11/03/1953 (re-sic !) et publiée au J.O. le 20. Fort curieusement, la ligne B est intégrée au réseau ferré départemental, tandis que la B1 était intégrée au réseau local urbain de la ville de Tours (alors que le tronçon de La Riche est sur la commune de ... La Riche !)
Un prolongement en quadrifilère fut rapidement envisagé pour la B1 vers SPDC, une fois les dommages de guerre réparés. Longue de 2820m, elle empruntait le pont du Milieu et s'achevait avenue Langevin, au croisement du Bd des Déportés. Elle fut réceptionnée provisoirement le 15/03/1955 et mise en service dans les jours qui suivirent (je n'ai pas la date exacte ...) et DUPée le 11/01/1956 (on ne s'étonnera pas que les registres d'enquêtes aient pour toutes les lignes été vides).
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La ligne nord-sud vint elle plus tardivement. Bifilaire de Charentais (au croisement de l'avenue du Mans et des rues Roux et Bergson) au carrefour de la Tranchée, elle était quadrifilère au delà. Elle fut classée comme d'intérêt local, excepté le tronçon avenue du Mans, qui faisait partie du réseau départemental. La réception provisoire se fit le 01/12/1952, l'exploitation commerciale débutant le 8 décembre 1952. La ligne ne fut DUP que le 30 mars 1954 (JO du 03 avril).
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On trouva toutefois vite ses désavantages au trolley : cher à l'achat, peu polyvalent, et surtout inaccomodable avec les travaux routiers ... Après pas mal de tergiversations, on décide cependant de prolonger en bifilaire la B1 de l'église de La Riche au nouveau quartier des Sables, qui acquis rapidement la réputation de Cour des Miracles de l'agglo, prolongement qui sera mis en service le 16 septembre 1963. La compagnie fit également l'acquisition pour une bouchée de pain au printemps 1962 de 3 Somua SW de la CTS strasbourgeoise, tout juste réformés (les trolleys ayant été supprimés là-bas le 30/03/1962). Les deux autres véhicules de la CTS rejoindront Tours à l'automne 1963.
Cependant les problèmes commencent déjà à s'accumuler pour les trolleys, et particulièrement pour la ligne C. L'aménagement du carrefour de l'Alouette limite la ligne au sud à la barrière de Grandmont (c'est à dire au carrefour de Verdun) à partir de 1962 (ou 1963 ?), un autobus assurant le service au delà. On parle toutefois encore sérieusement de prolonger la ligne jusque sur le plateau pour desservir le nouveau complexe scolaire de Grandmont. L'élargissement de la N10 dans la Tranchée aura finalement raison de la ligne. Je ne sais pas si elle a été limitée au parcours Jean Jaurès - Barrière de Grandmont ou si elle n'en aura pas eu le temps : toujours est-il que les trolleys cessent de circuler sur la C à la fin de l'année 1964 ou au début 1965 (impossible de trouver la date exacte), la suppression de la ligne ayant été décidée par le Conseil le 11/07/64. La ligne n'aura été exploitée que douze ans.
C'est en 1964-1965 qu'on décide d'abandonner à terme les trolleys sur les B-B1. La route sera aussi directement responsable, avec la coupure du pont du Milieu pour la construction de la déviation de la N10 et de la future A10 : la branche de la B1 vers SPDC, en service depuis 1955, fut coupée en 1963 (?) et remplacée par un service de bus. On hésita à la récupérer, mais les travaux de réinstallation des poteaux coutaient cher, et puis, et puis ... On décida finalement de réformer progressivement les derniers trolleys au fil des réceptions des nouveaux autobus. Le service cessa donc le 30 juin 1968.
J'ai pu trouver un bref état de parc de mai 1964 :
8 Vetra type C de 60 places, de 500 à 700.000kms, état médiocre.
4 Vetra type B de 80 places, de 550 à 600.000kms, état médiocre.
5 Somua SW. C de 60 places, de 170 à 300.000kms, état moyen.
5 Somua SW. B de 90 places de 550 à 600.000kms, état moyen. (Ce sont les ex-Strasbourg).
Je pense pouvoir dire qu'ils étaient respectivement numérotés 61-68, 71-74, 81-85, 86-90.
Et je n'ai malheureusement pour le moment aucune nouvelle photo ...